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8 février 2024
Critiques / Quoi de neuf

«Debussy: Images oubliées», astucieuses transcriptions

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Christophe Huss, Le Devoir

Stéphane Tétreault et Olivier Hébert-Bouchard présentaient jeudi soir à la salle Bourgie « Images oubliées », un programme de transcriptions d’oeuvres de Debussy, qui, dans l’ensemble, se sont avérées plutôt habiles.

Le concert « Images oubliées » reprenait en partie le programme du disque éponyme publié il y a onze mois chez ATMA. En fait, au-delà du disque, « Images oubliées » semble être le nom d’un projet consistant en la transcription pour violoncelle et piano d’oeuvres pour piano ou deux pianos de Debussy souvent puisées parmi les plus rares. On ébauchait donc, lors de ce concert, l’amorce potentielle d’un « volume II ».

Un pari risqué

La soirée avait en commun avec le CD les trois Images oubliées, ici éclatées au cours du programme, Tarentelle styrienne et Lindajara, une superbe oeuvre hispanisante. En nouveautés : Scherzo, Mazurka, et les quatre dernières pièces du programme : Masques, D’un cahier d’esquisses, Les soirs illuminés par l’ardeur du charbon (la pièce la plus récemment redécouverte de Debussy) et L’isle joyeuse.

Les deux mélodies de Fauré, intercalées, montrent un chemin forcément intéressant ; transposer pour violoncelle et piano une partition écrite pour voix et piano est un cheminement naturel. Ajouter un violoncelle à L’isle joyeuse tout simplement parce que Stéphane Tétreault et Olivier Hébert-Bouchard ont envie de donner des concerts ensemble en évitant de ressasser les sempiternelles sonates de ce type de duo (par exemple de Beethoven et Brahms) est compréhensible tient d’une légitimité musicale moins évidente.

Et pourtant cela marche plutôt bien. Le risque, sur le plan stylistique, lors du passage d’un instrument à cordes frappées, comme le piano, au violoncelle, est que la douce mélancolie debussyste (pour reprendre les qualificatifs autour de la première Image) devienne un sentimentalisme un peu appuyé. On faut reconnaître qu’on évolue passablement à la frontière, mais que le charme opère tout de même.

Le récital est intelligemment articulé (et présenté) par ordre chronologique avec, simplement, un retour à la période « de gloire » avec L’isle joyeuse, à la fin. C’est pour cette dernière que nous avions le plus de craintes. Certes en quelques endroits le violoncelle ralentit un peu l’irrépressible mouvement, mais le défaut est minime et l’association des deux instruments est fort plaisante. Elle devient même enrichissante dans le mystérieux Masques.

Musicalement, le pianiste Olivier Hébert-Bouchard n’est absolument pas phagocyté par Stéphane Tétreault et se montre à la hauteur de la difficulté des pièces. La soirée était instrumentalement de très bonne tenue.

À lire dans Le Devoir